Comme d’habitude, il s’assied sur la banquette défraîchie mais propre
du RER, ouvre son journal. La trentaine, brun, beau gosse, jeans chemise blazer,
jeune cadre dynamique.
Lui : 15 minutes de trajet, au prochain arrêt elle entre.
Aujourd’hui, je lui parle.
Comme tous les jours, elle balaie du regard le wagon et va s’installer
à la même place, face à lui. La trentaine, brune, manteau prune fermé col
officier, bottines assorties. Un grand sac fourre-tout couleur Camel.
Elle : Toujours caché derrière son journal, je suis certaine qu’il
a de beaux yeux.
Lui : Quel crétin, je suis ! Devant un parterre de
collaborateurs je vais présenter un projet qui sera applaudi et salué par mes
chefs et là devant Elle, je m’écrase !
Elle : j’aimerais bien savoir où il bosse ! je descends
toujours avant lui… et si aujourd’hui, je décidais de changer d’arrêt.
Lui : Pourquoi regarde-t-elle sa montre ? Le RER est à
l’heure pour une fois.
Elle : J’ai le temps ! Au pire, je prendrai un taxi pour finir
le trajet. Bon, ça va me coûter cher cette histoire, mais…
Lui : Elle sourit toute seule, à quoi pense-t-elle ? pourvu
qu’elle n’ait pas d’amoureux, elle a l’air bien gaie aujourd’hui.
Elle : Quel air bougon ! Beau gosse, mais je l’appellerai
bien grincheux !
Il baisse son journal surpris, elle n’est pas descendue à son arrêt
habituel. Il rencontre son regard, elle lui sourit.
Lui : Panique à bord je ne sais pas quoi faire. Mais parle-lui bon
sang, elle te sourit, c’est le moment !
Elle : Mais ? Il attend quoi ? Je ne veux pas parler la
première. Je souris encore plus ! Pourvu que je n’aie pas de morceau de
chocolat coincé dans mes dents ! J’en attrape mal à la joue ! Alors,
tu me parles oui ou non ?
Lui : C’est quoi ce sourire forcé ? Elle se moque de moi
oui ! Voilà mon arrêt je descends.
Il se lève rapidement, un hochement de tête vers elle, il descend.
Elle le suit des yeux puis lui emboîte le pas. Elle se retrouve sur le
quai. Il a disparu.
Elle : Quelle nulle ! Je ne vais quand même pas courir derrière
lui, je ne sais pas quelle direction il a prise.
Lui : Je suis en retard, j’appelle mon assistante pour la prévenir
que … Mais ?
Elle : Ah je le vois, il est au téléphone. Je suis sensée faire
quoi maintenant ?
Lui : Invite-là à prendre un café, tu es en retard de toute
façon !
Elle : Ah quand même, il s’approche.
Il est intercepté par un de ses collègues :
- Bonjour Marc, je t’emmène ?
Ils se serrent la main.
Lui : pas de chance
Elle : pas de chance
Ils partent chacun de leur côté.
Comme d’habitude, il s’assied sur la banquette du RER, ouvre son
journal. Toujours la trentaine, brun, beau gosse, costume bleu aujourd’hui,
réunion importante.
Lui : Putain Marc ! parle-lui à cette fille à qui tu penses
tout le temps, t’en as failli oublier le fil de ta présentation hier.
Il referme son journal, elle va arriver.
Lui : Pourquoi n’est-elle
pas là ? Pourvu qu’elle ne soit pas malade. Hier, déjà elle avait un air
bizarre à sourire tout le temps.
Il se cale au fond de la banquette et se projette sur sa prochaine
réunion.
Elle : J’ai pris le RER précédent, je suis certaine d’être à
l’heure, je stresse un peu. Je pense que le beau gosse au journal doit se poser
des questions. Elle sourit en entrant dans les locaux.
L’hôtesse l’accueille en lui souhaitant la bienvenue, lui offre un
café, la dirige vers la salle de réunion.
C’est la table recouverte de petites viennoiseries qu’elle aperçoit en
premier, elle n’a rien pu avaler au petit déjeuner, elle se laisserait bien
tenter mais la crainte d’avoir les mains grasses la dissuade.
Une voix grave la fait se retourner :
- Marc…
Lui : Impossible
Elle : Je n’y crois pas !
- Heureux de vous accueillir dans notre société, venez je vais vous
présenter…
- Bérénice…Enchantée !
Lui : Ce n’était pas si difficile finalement.
Elle : Il a une jolie voix.
Lui : Travailler avec elle tous les jours, Waouh !
Elle : Heureusement qu’il n’est pas mon chef !
- Monsieur ? Réveillez-vous …
Le contrôleur lui tape sur l’épaule gentiment.
Lui : J’ai rêvé ! Trop
beau pour être vrai.
Un coup d’œil sur sa montre lui indique qu’il est vraiment en retard.
Cette fille lui prend la tête et lui pompe toute son énergie. Il descend du RER
furieux de s’être endormi. La journée va être longue.
Comme d’habitude, il s’assied sur la banquette du RER, ouvre son
journal. Et puis non, pas de journal, il regarde par la fenêtre. Il pleut.
Comme tous les jours, elle balaie du regard le wagon et va s’installer
à la même place, face à lui.
Elle : Il n’a pas l’air en forme aujourd’hui.
Il se tourne vers elle :
Elle : il va me parler, j’ai le cœur qui bat tellement fort
que je suis certaine qu’il l’entend !
- Votre prénom ? c’est Bérénice ?
Elle éclate de rire.
Elle : Comment il le sait ?
Lui : Trop jolie quand elle rit.
- Bonjour Marc !
Lui : Comment elle le sait ?
Elle : Banco ! C’est son prénom. Trop forte !