Muguette n’hésita pas à
suivre son amie, bousculant à nouveau le pauvre serveur qui allait finir par
renverser ses verres.
̶
Ces dames vont revenir quand même ?
demanda-t-il en fronçant les sourcils.
̶
Oui, ne vous inquiétez pas, répondit
Jasmin.
̶
Tu es bien sûr de toi, répliqua Prune.
̶
Oui, je connais bien Muguette. Elle va
réussir à convaincre Félicie de revenir.
Félicie s’était arrêtée
devant l’arrêt de bus. C’est là que Muguette la rejoignit.
̶
Laisse-moi Mug, je suis une
imbécile !
̶
Je suis d’accord avec toi pour le
coup ! Mais pourquoi te prends-tu la tête avec cette histoire de
nom ? Tu n’es pas encore mariée que je sache !
̶
Ne me fais pas la morale, tu veux
bien ? C’est bien toi qui s’est entiché d’un homme parce qu’il s’appelait
Jasmin ? Un nom de fleur comme toi ! Alors tu la mets en veilleuse
d’accord ?
̶
Hey, tu me parles sur un autre ton. Je
veux simplement te dire que tu viens juste de le rencontrer cet Angelo et tu en
es déjà aux noms des enfants. Tu ne trouves pas que tu vas un peu vite ?
Le bus arrivait. Félicie
leva la main. Mais Muguette lui baissa d’autorité.
̶
Tu ne vas pas monter dans ce bus, tu
reviens à la pizzéria avec nous.
Le chauffeur ouvrit ses portes. Un
coup d’œil vers les jeunes femmes. Il referma ses portes.
̶
Ecoute Félicie, tu as paniqué, ça se
comprend. Tu es un peu chamboulée en ce moment avec l’histoire de ta sœur…
̶
Parlons-en justement de ma sœur !
C’est elle qui a éclaté de rire en pensant à Félicie Rossi…
̶
Qui va penser à ça franchement ? Et
puis comme je te l’ai déjà dit, tu n’es pas obligée de prendre son nom. Et tes
enfants, puisque tu te projettes si loin, s’appelleront Rossi.
Félicie regarda son amie et
hésita :
̶
Tu crois ?
̶
Mais j’en suis certaine. Allez viens. Les
apéros étaient servis. Les autres doivent nous attendre.
̶
Je savais bien qu’elle réussirait à la
ramener, dit Jasmin, en voyant revenir les deux jeunes femmes.
Ils
ne posèrent aucune question et levèrent leur verre tous ensemble.
̶
Au fait, reprit Muguette après avoir posé
son verre. J’ai trouvé une superbe maison.
Le
silence se fit autour de la table.
̶
Vous avez perdu vos langues ?
̶
Non, non, répondit Prune, mais pourquoi
dis-tu que tu as trouvé une superbe maison. Tu comptes déménager ?
Muguette se tourna vers Jasmin :
̶
Tu ne penses pas que ce serait bien si
nous habitions ensemble ?
Jasmin
s’étrangla avec sa boisson. Il ne s’attendait pas du tout à ça. Cette femme
l’étonnera toujours. Angelo tapa sur l’épaule de son ami :
̶
Bravo mon ami ! Enfin, tu vas
t’installer, ce n’est pas trop tôt !
̶
Tu peux parler, tu es toujours célibataire
que je sache !
̶
Plus pour longtemps je pense !
Il
fit un clin d’œil à Félicie qui rougit. Muguette reprit alors :
̶
Puisque nous sommes tous réunis, pourquoi
ne pas en parler. J’ai une belle maison qui est à la vente. Pourquoi ne pas
aller la visiter Jasmin ? Depuis le temps que tu me répètes que tu veux
emménager…
̶
Je pensais que nous en parlerions tous les
deux d’abord.
̶
Mais nous sommes entre amis là. Comme ça
nous n’aurons pas besoin d’en reparler ils seront au courant. Vous voulez la
voir ?
La
jeune femme sortit alors de son sac les photos de la maison qu’elle avait
repérée. Félicie essaya discrètement de donner un coup de pied à son amie.
̶
Tu me fais mal Félicie ? Pourquoi tu
me fais du pied ?
Elle
continua à étaler les photos sur la table, recouvrant au passage les assiettes
et les couverts. Angelo s’intéressa aussitôt au bâtiment :
̶
C’est joli dis-moi ! C’est à quel
endroit ?
̶
Tu ne crois pas qu’on aurait pu en parler
avant rien que nous deux ? l’interrompit Jasmin.
̶
Tu fais toujours des histoires pour rien.
Je travaille dans une agence immobilière. J’ai vu passer cette annonce. Elle me
plait. J’en parle. Où est le mal ?
̶
Mais Muguette, choisir une maison pour y
vivre ensemble n’intéresse pas le monde entier.
̶
Ce n’est pas le monde entier, il s’agit de
nos amis, je te rappelle. De plus, Angelo, tu le connais depuis plus longtemps
que nous, alors si-il-te-plait, ne fais pas ton rabat-joie ! On est en
famille là !
̶
Je refuse de regarder ces photos !
Il
se leva brusquement au moment où le serveur apportait les pizzas :
̶
La royale c’est pour qui ?
̶
Pour Madame, persiflât-il, en désignant
Muguette. Pour ce qui est de mettre la pagaille elle est royale ! Bon
appétit !
Il
les abandonna sans un regard.
̶
La 4 fromages c’est pour ?
̶
Il est parti … répondirent en chœur Prune
et Félicie.
̶
Ce n’est pas toi qui me disais que j’étais
une imbécile tout à l’heure ? reprit Félicie en regardant Muguette, parce
que là, tu as dépassé les bornes une fois de plus.
̶
Bon on mange, parce que j’ai faim. Et si
on se partageait celle de Jasmin ? demanda Muguette, balayant d’un geste
la réflexion de Félicie.
̶
Ils sont vraiment sympas tes amis, murmura
Angelo, on ne s’ennuie pas une seconde. Et toi Thomas, on ne t’entend
pas ? Thomas ?
Statufié,
l’architecte regardait la jeune femme qui venait d’entrer dans la pizzeria.
Prune suivit son regard.
̶
Tu la connais ?