Une maman qui prend soin d'elle. Qui aime écrire, lire et faire de la musique.

mardi 30 octobre 2018

Histoire d'Hommes





Jasmin faisait le pied de grue devant l’agence de Muguette. Il avait pris une journée de congé et espérait avoir réponse à ses questions. Sauf que les cloches de l’église sonnaient déjà 9 heures  et que la jeune femme n’était toujours pas là. Il s’approcha de la vitrine pour y jeter un coup d’œil. Aucune lumière ne filtrait.
— Je parie que vous êtes Jasmin !
Surpris, il se retourna.
— Bob, un ami de Mug. Mais elle m’a tellement parlé de vous que je vous aurais reconnu entre mille. Elle n’est pas encore arrivée ?
Jasmin hocha la tête et serra la main du nouveau venu. Il ne savait pas du tout qui était Bob. Apparemment, il ne connaissait pas aussi bien la jeune femme qu’il le pensait.
— Elle est en retard, ce n’est pas son habitude. Je vais l’appeler, elle a peut-être eu une panne d’oreiller.
Sans se préoccuper de Jasmin, il saisit son portable et composa le numéro.
— Mug ? Ton réveil n’a pas sonné ?
Bob s’éloigna un peu et Jasmin interloqué n’entendit plus la conversation. Son premier réflexe avait été de piquer le téléphone du jeune homme. Il piaffait d’impatience devant l’agence sans oser s’approcher.
Bob quant à lui, s’éloignait de plus en plus et jetait de temps à autre un regard furtif vers le directeur des impôts.  Finalement, il rangea son portable dans sa poche en sifflotant et profitant que Jasmin ne le regardait pas, s’en alla.
— Vous comptiez partir sans rien me dire ?
Jasmin le fusillait du regard. Bob, sourit.
— Elle est en vacances. Vous ne saviez pas  ?
Jasmin l’attrapa par le col de sa veste et le regardant dans les yeux demanda :
— Dites-moi où elle est ?
— D’abord, tu me lâches !  Et si elle est partie la Muguette, c’est que tu lui as fait une entourloupe. Amoureuse comme elle est, t’as vraiment dû lui faire mal ! Alors, j’te dirais pas où elle est.
Jasmin soupira et le lâcha. Bob, alluma une cigarette.
— T’as mal hein là ?
Il lui posa la main sur le cœur.
— Mais qu’est-ce que t’as bien pu faire pour qu’elle se carapate ?
— Je vous offre un café ?
— Tu peux me tutoyer, on aime la même femme, alors on est un peu frère !

Thomas n’en revenait pas. Prune n’était pas rentrée du week-end. Au téléphone, elle avait refusé catégoriquement de revenir si Anabelle travaillait toujours avec lui. Il avait insisté, argué que c’était son boulot et qu’il y avait une belle somme d’argent à la clé, rien à faire. Prune était restée chez Félicie. Il n’avait pas osé aller la chercher.
Il devait en plus supporter le regard noir de son fils qui donnait raison à sa maman.
— C’est relou quand même de travailler avec ton ex. Si c’était un thon encore, mais là, avoue qu’elle est canon !
— Tu as vu comment tu me parles Fred ? J’aime ta mère, je ne comprends pas qu’elle ne me fasse pas confiance.
— Mais t’es ouf ! Tu ne lui as même pas dit que t’avais une ex et que t’allais te marier avec, comment tu veux qu’elle te fasse encore confiance ?
— Mais ça fait longtemps, il y a prescription !
— Tu rigoles ? Anabelle ? Prescription ? Tu as vu comment tu la mates ?  Normal que maman prenne feu !
— Arrête Fred, tu délires.
— Je ne crois pas non ! Et si ça continue comme ça, j’irais dormir moi aussi chez Félicie. Je ne vais pas rester ici avec toi. Sur ce, ciao, je file au lycée.
Fred saisit son sac et partit en claquant la porte.

— Tu penses qu’il va faire les examens ?
Félicie regardait Angelo. Le lundi matin, il ouvrait plus tard sa boutique. Félicie était en vacances et elle avait décidé de l’accompagner pour voir un peu comment ça se passerait si elle travaillait avec lui.
— Franchement ? Je n’en sais rien … Il est tellement trouillard. Je n’arrive pas à comprendre comment un homme comme lui reste sous le joug de sa famille sans rien dire.
— Mais c’est quoi cette histoire de stérilité ?
— Mais c’est parti de rien. Jasmin a eu les oreillons, et je les ai eus juste après.  Quand nous avons été ado et que nous commencions à regarder les filles, j’ai voulu aller à la pharmacie pour acheter des préservatifs mais je n’avais pas d’argent sur moi et nous avions envie de rigoler. Nous y sommes allés tous les deux et nous nous sommes trouvés dans le magasin en même temps que son grand-père. Une drôle de coïncidence quand j’y repense…
Angelo se tut et réfléchit.
— Continue…Ne me dis pas que le papy a fait un esclandre ?
— Figure-toi que Jasmin ne l’avait pas vu et quand il a demandé, pas très fier parce que nous n’avions que quatorze quinze ans et qu’on ne savait pas trop comment  demander une boîte de préservatifs, son grand-père a entendu et a éclaté de rire dans la pharmacie.
— Non ? Il n’a pas fait ça ?
— Mais si ! Heureusement il n’y avait pas foule mais quand même !
— Et alors ?
— Il a claironné qu’il n’en avait pas besoin par ce qu’il ne pouvait pas avoir d’enfants. Ce à quoi la pharmacienne a répondu que ça servait aussi à le protéger et que c’était une très bonne initiative… Jasmin est devenu rouge comme un coquelicot, il a tourné les talons et est parti en courant. Je l’ai suivi. Et on n’a jamais plus acheté de préservatifs ensemble.
Angelo soupira.
— Cette histoire vient juste de me revenir. Après… Mais oui je me rappelle… C’est à partir de ce jour que nous ne nous somme plus vus. Il est parti faire des études je ne sais plus où. Moi, je suis resté ici. Mais, j’y repense maintenant, il a toujours voulu travailler la vigne. C’est à partir de ce jour qu’il n’en a plus jamais parlé et qu’il est parti pour entrer dans l’administration. Je ne l’ai revu qu’à la pizzeria. J’avais complètement perdu le contact avec lui. C’est drôle non ?


lundi 22 octobre 2018

Sans Muguette


Samedi matin chez Angelo et Félicie, petit déjeuner.
— Je suis inquiète, soupire Félicie. Jamais Muguette ne m’a laissé sans nouvelle.
— Tu n’as aucune idée vraiment ?
Prune assise en face d’elle sirote son café, les yeux dans le vague. La nuit n’a pas été bonne pour la jeune femme qui n’a cessé de penser à son homme avec Anabelle. Elle a laissé son fils chez elle. Il n’avait pas voulu la suivre. Il avait promis de la tenir au courant. Prune s’en voulait de mêler Fred à leurs histoires d’adultes.
Les jumelles sont seules. Angelo est parti faire le plein de fleurs pour sa boutique. Le samedi est une journée chargée pour lui. Il a laissé le café prêt et a concocté une brioche dont l’odeur se répand encore dans la cuisine.
— Franchement Félicie, qu’est-ce qui a bien pu se passer pour que Muguette gifle le grand-père et s’enfuit ?  Je sais bien qu’elle est impulsive mais quand même !
— Oui, j’avoue …
— Tu me caches quelque chose j’en suis sûre !
Prune regarda sa sœur dans les yeux.
— Je sais bien que vous êtes proches toutes les deux, mais c’est mon amie aussi. Si tu sais quelque chose, tu dois me le dire.
— Fred ne t’a rien raconté ?
— Non. Pétunia est arrivée juste au moment de la gifle. Elle n’a rien entendu apparemment.
Félicie murmura.
— Muguette m’a appelé hier soir, très tard ou tôt ce matin.
— Je le savais.
— Ne sois pas fâchée Prune. Nous nous connaissons depuis tellement longtemps.
— Alors raconte ! Elle ne t’a pas obligé à garder le secret ?
Le portable de Prune sonna à ce moment. Quand elle vit que c’était son mari, elle hésita. Sa sœur sourit :
— Réponds, tu en meurs d’envie.
A contrecœur, elle décrocha.

Angelo venait d’ouvrir sa boutique quand la clochette retentit. Il tourna la tête et ne fut pas surpris de découvrir son ami.
— J’étais certain que tu allais débarquer ce matin ici.
— J’imagine qu’elle est avec ta copine ?
Le ton sarcastique de Jasmin horripila Angelo qui rétorqua.
— Qui elle ? Bonjour d’abord.
Il continua d’installer ses fleurs dans les vases sans le regarder.
— Excuse-moi mais je suis d’une humeur de chien.
— Je n’avais pas remarqué.
— Angelo regarde-moi enfin.
Son ami leva la tête.
— J’ai du boulot, je ne suis pas comme les fonctionnaires qui ne travaillent pas le week-end.
— D’accord. Mais avoue que j’ai de bonnes raisons d’être furieux.
— Je ne sais pas ce qu’il s’est passé.
— Elle ne t’a pas raconté ?
— « Elle » comme tu l’appelles, celle dont tu es amoureux et qui porte ton enfant, a un prénom. Elle s’appelle Muguette. Non, elle ne m’a rien raconté parce que personne ne sait où elle est.
Jasmin ouvrit de grands yeux.
— Tu veux dire que même Félicie ne sait pas ? Et elle ne s’est pas réfugiée chez toi ?
— Non tu vois !
Jasmin, les mains dans les poches, arpentait la boutique à une vitesse qui donnait le vertige à son ami qui l’apostropha :
— Arrête, tu vas stresser mes fleurs !
— Tu rigoles ?
— Ecoute, tu es de mauvaise humeur, je peux le comprendre mais je n’y suis pour rien.
— Muguette a giflé mon grand-père.
Angelo siffla en regardant son ami.
— Enfin !
— Quoi enfin ? Tu trouves ça normal ?
— Il fallait bien qu’un jour ça arrive. Il est infernal le patriarche, tu le sais bien.
— Et le respect des personnes âgées, tu en fais quoi ?
— Ils n’ont pas tous les droits. Ta femme avait certainement de bonnes raisons de…
— Ce n’est pas ma femme, rugit Jasmin.
— Elle porte ton enfant, c’est tout comme !
— Ce n’est pas le mien !
Angelo regarda son ami.
— Encore cette vieille histoire ? Je comprends mieux. Ton grand-père a dû sortir une ânerie dans le genre « qu’il ne voulait pas de bâtard chez lui » C’est normal qu’elle ait pris la mouche. Tu te rends compte quand même de l’insulte ?
— Je ne peux pas avoir d’enfant.
— Tu en as la preuve ?
— J’ai eu les oreillons quand j’étais petit.
— Moi aussi je les ai eus après toi, c’est toi qui me les as refilés, ça ne m’empêche pas de pouvoir avoir des enfants.
— Il paraît que moi …
— Arrête Jasmin. As-tu fait des analyses ?
— Pourquoi faire ?
— Pour connaître la vérité.
Jasmin se laissa tomber sur le tabouret décoratif qui  gémit et faillit s’effondrer sous le poids dont il n’avait pas l’habitude.
— Ne me casse pas mon matériel. Il supporte les fleurs pas les baraqués comme toi !
Il se releva.
— Qu’est-ce que je dois faire Angel ?
Jasmin avait spontanément utilisé le surnom de leur enfance. Son ami le regarda dans les yeux.
— Ce que tu aurais dû faire depuis longtemps. Vérifier que tu peux avoir des enfants.
— Tu parles d’un examen amusant toi !
Angelo éclata de rire.
— On n’a rien sans rien Jasmin. Fais-le, tu seras enfin débarrassé de cette histoire qui t’empoisonne la vie.
— J’en veux à mort à Muguette.
— Ne fais pas le gamin mon pote. Elle a dérapé mais je ne luis donne pas complètement tort.
— Elle ne pourra jamais faire partie de ma famille.
— Tu es sérieux ? Mais à quelle époque tu vis ?
— Elle a giflé mon grand-père.
— J’ai compris, tu n’arrêtes pas de le répéter. Il doit être vexé le bougre !
Angelo ne put s’empêcher de sourire devant l’air furibond de son ami.
— Tu ne l’as jamais aimé avoue !
— Je suis bien content que le mien ne ressemble pas au tien.
Un silence s’établit entre les deux hommes. Angelo en profita pour arroser ses plantes. Il surveillait du coin de l’œil Jasmin.
— Tu ne sais vraiment pas où elle est ?
— Non.
— Pas d’appel ?
Angelo hésita mais ne voulant pas trahir Félicie il répondit.
— Rien.
— Tu as hésité, je t’ai vu.
— Félie a effectivement reçu un appel cette nuit. J’étais à moitié endormi et ce matin, je suis parti avant son réveil.
— Appelle-la pour savoir et pourquoi tu ne lui as rien demandé ?
— Parce que je dormais et que Félicie a le droit de recevoir des appels et puis cesse de me donner des ordres Jasmin, tu m’agaces. Tu n’as qu’à l’appeler toi. Moi j’ai du travail. Regarde, j’ai un livreur qui arrive. Désolé, je vais devoir te laisser.
Jasmin, la mine basse quitta la boutique.

vendredi 12 octobre 2018

La disparition de Muguette


Muguette ne réfléchit plus. Il faut qu'elle s’échappe de cette bâtisse qu’elle ne supporte pas. Elle fuit. Jasmin ne fermant jamais sa voiture à clé, elle a le temps de récupérer son sac de voyage et elle court. Une fois sur la route, elle saisit son portable et voit qu’un « Uber » n’est pas loin. Elle envoie le message et elle n’attend pas longtemps. Elle grimpe dans le véhicule. Elle donne l’adresse. Une fois arrivée chez elle, elle consulte rapidement son agenda et voit qu’elle n’a pas de rendez-vous important pour la semaine. Elle enfourne dans son sac quelques vêtements supplémentaires, boucle sa trousse de toilette en un temps record et saisit son portable, tape un numéro. Ça décroche à la première sonnerie. Muguette murmure :
— J’arrive.
Elle donne un tour de clé et part sans se retourner.

Fred accueillit Anabelle avec un grand sourire et un air nigaud qui ne trompa pas son père qui fronça les sourcils. La jeune femme quant à elle, habituée à l’effet qu’elle provoquait, embrassa sur les deux joues le garçon qui rougit jusqu’aux oreilles.
— Ferme la bouche tu ressembles à une carpe, soupira Thomas.
Son fils le foudroya du regard et quitta la pièce en claquant la porte. Devançant les excuses de son ex, Anabelle rit.
— Ne t’inquiète pas, j’ai l’habitude. Par contre, je ne vais pas faire le même effet sur ta femme qui rapplique comme un bouledogue.
En effet, Prune arrivait la mine renfrognée. Elle attaqua aussitôt.
— Qu’est-ce que tu fais ici ?
— Je viens pour le travail et c’est la vérité. Demande donc à ton mari.
Thomas hocha la tête mais Prune ouvrit la porte et lui indiqua la sortie.
— Dehors, je ne te veux pas chez moi.
Fred revint sur ses pas et interloqué regarda sa mère. Il eut la malencontreuse idée d’intervenir.
— Maman ? Mais qu’est-ce…
— Ne te mêle pas de ça, tu veux bien. File dans ta chambre.
Vexé par le ton, il rétorqua durement.
— Hey, je ne suis plus un gamin, tu ne me parles pas comme ça.
Anabelle, heureuse de voir ce qu’une fois de plus elle provoquait, en rajouta.
— Normal, ta mère n’accepte pas que ton père ait eu une liaison avant de la connaître. En fait, je suis son ex.
Elle lâcha sa bombe, certaine de l'effet qu'elle allait provoquer. Ce qu’elle n’avait pas prévu, c’est que le jeune homme prendrait aussitôt la défense de sa mère et attaquerait son père.
— Papa avec …
Il regarda Anabelle et finalement ne la trouva plus du tout « canon ». Tourné vers Prune, il lui sourit et la prit dans ses bras marquant totalement sa désapprobation vis-à-vis de son père. Prune reprit de plus belle haussant la voix.
— Je t’ai dit DEHORS !
Elle voulu pousser la jeune femme quand son mari s’interposa.
— Laisse, elle travaille avec moi. Tu vas devoir t’y habituer, nous avons un dossier pour la ville à monter ensemble. Comme nous avons terminé un peu tard, je lui ai proposé de venir boire l’apéro chez nous et…
— Mais tu ne manques vraiment pas d’air toi ! Elle reste ici, c’est moi qui pars.
Fred, inquiet de voir sa maman pâle comme un linge, plaida sa cause auprès de son père.
— Tu peux comprendre quand même !
— Ce n’est pas grave finalement Thomas, dit Anabelle d’une voix mielleuse. Allons donc prendre un verre à l’extérieur si je dérange ici. Je t’attends à la voiture.
Elle sortit dignement en faisant claquer ses talons et faisant voler sa jolie natte blonde.
— Si tu pars avec elle, quand tu reviendras je ne serais pas là.
Les deux époux s’affrontèrent du regard. Thomas ne baissa pas le sien et emboîta le pas à sa collègue.
Les larmes aux yeux, Prune l’interpella à nouveau.
— Thomas ?
— Tu es adulte non ? Tu peux comprendre qu’Anabelle n’est plus rien qu’une collègue de boulot et que je vais devoir travailler souvent avec elle.
— Aller prendre un verre fait aussi parti du projet ?
— Ne sois pas idiote. Nous étions venus ici. Tu ne veux pas la recevoir et comme j’ai encore quelques points à éclaircir avec elle, je sors et nous verrons ça dans un bar.
— Ne me fais pas croire qu’un vendredi soir vous allez parler encore boulot autour d’un verre !
— Crois ce que tu veux Prune, je ne vais pas me fâcher avec toi.
Il s’installa au volant et sans un regard pour sa femme, démarra.

— Tu ne sais pas quoi maman ?
Fred au téléphone n’en revenait pas. Décidément, c’était la journée des surprises. Avec les adultes, il fallait vraiment s’attendre à tout. Il regarda sa mère et voulu la faire rire.
— C’était Pétunia, tu sais la sœur de Jasmin.
Machinalement, Prune hocha la tête.
— Muguette a giflé son grand-père !

Félicie attendait Jasmin qui n’allait pas tarder à rentrer de sa boutique. La jeune femme se sentait bien dans cette jolie maison. D’autant plus qu’il faisait encore beau et même si l’automne s’annonçait, les températures étaient encore douces. Elle préparait un petit repas d’amoureux quand son portable bipa. Heureuse de voir que sa sœur l’appelait, elle décrocha rapidement.
— Tu connais la dernière ?
Prune semblait affolée au bout du fil.
— Vas-y raconte.
Félicie s’attendait à ce que Prune lui raconte qu’Anabelle avait encore fait des siennes, étant mise au courant par Muguette que celle-ci avait été vue avec Thomas.
— Muguette a giflé le grand-père de Jasmin.
Félicie de surprise en lâcha son téléphone. C’est à ce moment qu’Angelo stoppa sa voiture devant la porte.
— Tu m’entends ? s’époumonait Prune
Ramassant son portable, elle croisa le regard de son amoureux.
— Qui t’a raconté ça ?
— Pétunia. Elle vient d’appeler Fred. Je n’en sais pas plus.
— Je vais essayer d’appeler Muguette.
— Dis… Je peux venir chez toi ce soir… Je ne sais pas où aller. Thomas est avec Anabelle pour soi-disant le boulot et je ne veux pas qu’il me trouve quand il rentre.
— Je suis chez Angelo.
— Chez nous, corrigea l’italien en l’embrassant dans le cou.
— Je vais te déranger alors ?
— Bien sûr que non, viens je t’attends. Tu sais où c’est ?
— File moi l’adresse, je mettrais le GPS.
Une fois raccroché, Félicie se tourna vers Angelo.
— Tu connais la dernière de Muguette ?
— Oui, Jasmin m’a appelé. Le pire c’est qu’elle a disparu et qu’il ne sait pas où elle est.
— Prune va débarquer ici.
— Terminé notre repas d’amoureux alors ?
Un long soupir lui échappa alors involontairement. En tombant raide dingue de Félicie, il n’avait pas envisagé qu’il allait devoir subir l’invasion de ses amies.
— Si ça te dérange, je vais chez moi et …
— C’est bon, je vais préparer une pizza géante comme j’en ai le secret. Et… Chérie… Tu es ici chez toi, ne l’oublie pas. Tu m’agaces quand tu dis que tu es « chez Angelo ».
Il l’enlaça et ils s’embrassèrent langoureusement.

vendredi 5 octobre 2018

Week-end mouvementé pour Muguette et Prune



Prune fulminait et c’était bien dommage pour un vendredi. Elle avait dû quitter le bureau et rentrer chez elle laissant Thomas avec Anabelle. Depuis la dernière fois où Monsieur le Maire les avait accompagnés, ils s’étaient retrouvés plusieurs fois. Son mari avait bien tenté tout en restant évasif de lui expliquer qu’il s’agissait d’un projet qu’ils allaient traiter en commun, Anabelle étant elle aussi architecte, mais Prune faisait sa tête de mule et refusait qu’il s’explique.
La jeune femme avait bien tenté de laisser traîner ses oreilles à la porte. Elle en était restée pour ses frais. Soit les pièces étaient très bien insonorisées, soit ils étaient très discrets. Déçue, elle avait patienté en traitant ses dossiers et en jetant de plus en plus souvent un regard sur la porte fermée. Finalement, elle était repartie chez elle, furieuse de n’avoir pas osé frapper à la porte.
Maintenant, elle était dans sa cuisine et tournait en rond.
— Bonsoir Maman !
Fred son fils, rentrait du lycée et s’installa à la table après avoir saisi une bouteille de jus de fruit.
— Tu en fais une tête ! Papa n’est pas revenu avec toi ? On dîne à quelle heure ?
Comme tous les ados Fred ne laissait même pas répondre sa mère. Il enchaînait les questions les unes après les autres sans se préoccuper de ce qu’elle pouvait penser. Surpris tout de même par son silence, il la regarda tout en sirotant son soda.
— Tu vas bien ? On dirait que tu as avalé un truc de travers.
— Oui oui ne t’inquiète pas ! 
— Ah voilà papa, j’entends la voiture.
Fred souleva le rideau.
— Tiens, il n’est pas seul ! Waouh c’est qui la fille avec lui, tu la connais ? Canon, quand même !
Il se leva pour les accueillir et faire le malin devant Anabelle.


Jasmin et Muguette s’apprêtaient à monter dans la voiture pour partir en week-end chez le jeune homme. Elle avait préparé un petit sac de voyage espérant qu’ils n’allaient pas s’éterniser dans les vignes. Pleine d’appréhension, elle s’assit sur le siège passager et se laissa aller contre le dossier. Jasmin démarra et lui glissa qu’il ne fallait pas qu’elle s’inquiète. Ses parents et ses grands-parents étaient ravis de l’accueillir et impatients de faire sa connaissance. Il rappela qu’elle était la première femme qu’il présentait à son grand-père ce qui n’eut pas le don de la rassurer. Elle avait l’impression qu’elle allait passer un examen et que suivant les résultats elle aurait droit à intégrer leur famille ou pas.
— Quand même c’est d’une autre époque ces présentations. Tu ne trouves pas ?
— C’est comme ça ma chérie ! Tout va bien se passer tu verras.
Il n’osa pas lui avouer qu’il était anxieux et qu’il craignait les réactions de sa compagne face aux facéties de son grand-père.
Ils arrivèrent rapidement devant la grande bâtisse qu’ils avaient contemplé chez Angelo depuis sa terrasse. Jasmin descendit pour ouvrir la portière de Muguette qui sourit.
— C’est l’ambiance qui veut ça  pour que tu m’ouvres la portière ?
Elle regarda autour d’elle et aperçut aussitôt un couple qui avançait vers eux en leur tendant les mains.
— Je te présente mes parents, murmura Jasmin.
Antoine de la Rochefleurie la prit dans ses bras sans manière.
— Enchanté de vous rencontrer, vous êtes la bienvenue !
— Bienvenue, bienvenue, c’est à moi d’en décider non ?
Une voie grave et sèche la fit sursauter.
— Mon grand-père !
Un homme aux cheveux blancs se tenait raide comme un piquet sur le perron. Il regardait la jeune femme avec insistance. Appuyé sur une canne au pommeau d’or, il leur fit signe d’avancer d’une main.
Muguette surprise par la réflexion du grand-père renâcla à les suivre. Jasmin lui saisit la main.
— Ne faites pas attention, murmura en souriant Elisabeth de la Rochefleurie, il n’est pas méchant. Il a toujours été comme ça. Je m’y suis habituée. Que voulez-vous c’est « Le » Patriarche.
— Bonjour Mademoiselle. Approchez, approchez, tendez-moi votre main.
Surprise, elle se laissa faire et elle eut droit à un magnifique baise-main. Incliné vers elle, il plongea ses yeux bleus dans les siens. Gênée, elle retira sa main.
— Bonjour Grand-Père !
Jasmin embrassa le patriarche et invita sa compagne à le suivre à l’intérieur de la bâtisse. Mais le bras de Louis de la Rochefleurie le stoppa dans son élan.
— Pourrais-je savoir votre prénom Mademoiselle ?
— Muguette, répondit-elle gentiment.
Son regard se tourna alors vers son fils qu’il apostropha.
— Voilà à quoi ça nous mène tes histoires de prénom. Après Jasmin et Pétunia, une Muguette. Je n’en finirai donc jamais avec ces fleurs ridicules.
Il la regarda à nouveau.
— Vous n’avez rien à voir avec la fleur. Vous n’avez rien de délicat. Vous êtes plutôt une belle lionne. Je me trompe ?
— Méfiez vous que je ne vous griffe Monsieur.
Il éclata de rire et les invita à entrer.
— Elle me plait bien ton amie !
Jasmin serra davantage la main de sa compagne. Elle eut l’impression d’avoir réussi l’examen de passage.
Une charmante vieille dame assise sur un sofa les attendait. Tout de rose vêtue, un sautoir autour du cou, elle leur sourit.
— Veuillez m’excuser si je ne suis pas venue à votre rencontre, mais je souffre depuis ce matin d’un douloureux mal de dos, aussi je m’économise un peu. Entrez et venez donc vous asseoir près de moi. Muguette n’est-ce pas ? Mon mari ne va guère apprécier. Lui qui a horreur des fleurs.
Tout en parlant, elle détailla la jeune femme qui se sentait de moins en moins à l’aise.  Joséphine de la Rochefleurie s’en rendit compte. Elle se tourna alors vers son petit-fils.
— Tu ne viens pas m’embrasser ?
Jasmin prit sa grand-mère dans ses bras. Elle lui susurra à l’oreille que sa fiancée était magnifique et qu’elle lui plaisait beaucoup.
Un plateau de petits fours attendait sur la table de salon. Antoine de la Rochefleurie demanda à Muguette ce qu’elle désirait boire. Une carafe d’eau s’invitant près du champagne, elle la désigna en souriant.
— Comment ? Tonna le grand-père. Vous ne désirez pas goûter notre excellent champagne ? Jasmin, ce n’est pas une femme que tu as là. Mademoiselle, il faudra que vous vous y fassiez à boire de l’alcool. Regardez autour de vous. Vous voyez toutes ces vignes ? C’est mon domaine et j’en suis fier. Sers-lui un verre et ne refusez pas.
Muguette qui commençait sérieusement à s’énerver n’eut pas le temps de répondre qu’elle fut surprise par une nausée qui lui fit demander à Jasmin où se trouvaient les toilettes. Une main sur la bouche, elle le suivit en courant.
Louis surpris invectiva sa belle-fille.
— Elisabeth ? Vous pensez la même chose que moi ?
Sa femme Joséphine posa une main apaisante sur son bras pour le faire taire mais il devint rouge de colère.
— Je ne tolérerai pas de bâtard dans la famille des Rochefleurie.
Muguette qui revenait entendit l’insulte. Elle s’approcha du patriarche et lui asséna une gifle magistrale. Il chancela sous le choc. Un silence de mort s’abattit dans le salon. Pétunia qui s’encadrait devant la porte au même moment éclata de rire.
— Tu ne l’as pas volée celle-là ! Enfin quelqu’un qui a osé faire ce dont je rêve depuis si longtemps.
Muguette passa en courant devant Jasmin et s’enfuit.