Angelo
avait invité Félicie chez lui. Quand elle arriva devant sa porte, elle regarda
autour d’elle. Des fleurs, des arbres, une impression de sérénité, elle se sentait
bien. Rien à voir avec son appartement, certes très agréable, mais dénué de
charme comme ici. Elle humait les senteurs qui s’échappaient des fleurs qui
jalonnaient le sentier qui menait à la porte.
—
Te voilà enfin ? Je croyais que tu n’allais jamais trouver, s’exclama
Angelo en lui plaquant un baiser sur la bouche.
—
C’est chez toi ? C’est là que tu habites ?
—
Oui, pourquoi ? Viens, entre, je te fais visiter.
Sultan,
le bouvier bernois déboula alors la queue en panache et faillit renverser la
jeune femme qui éclata de rire. L’animal lui tourna autour en aboyant.
—
Du calme, Sultan ! Il est heureux de te voir dis-moi, il t’a adoptée et
crois-moi, ce n’est pas toujours gagné. Il est méfiant d’habitude. Allez viens,
entrons.
Il
faisait frais dans la grande bâtisse mais aussitôt la jeune femme s’y sentit
bien.
—
Tu vis seul ici dans cette grande maison ?
—
Oui. C’est une maison qui appartenait à mes grands-parents. Viens, je vais te
montrer quelque chose.
Ils
ressortirent par la porte de la cuisine qui donnait sur un panorama magnifique
de côteaux et de vignes. Angelo embrassa le paysage de son bras et montra une bâtisse
au loin.
—
Tu vois là-bas, c’est chez Jasmin.
—
Jasmin ? Le Jasmin de Muguette ? s’exclama surprise Félicie
—
Oui. Quand je te disais que nous étions voisins.
—
Pas tout près quand même !
—
Par la route, si je t’assure. En vélo, nous ne mettions que dix minutes pour nous
retrouver.
—
Vous étiez super copains ?
—
De vrais amis tu veux dire. Nous le sommes toujours.
—
Il habite toujours chez ses parents ?
—
La bâtisse est grande, c’est une saga familiale chez eux. Les grands-parents
sont toujours là. Ils étaient viticulteurs. Ils sont à la retraite, mais le
grand-père est toujours bien présent à quatre-vingts ans passés.
—
Tu veux dire que Jasmin habite toujours avec ses parents.
—
Hum !
—
Et Muguette qui lui fait visiter une maison aujourd’hui, tu penses qu’il va
accepter de quitter cette bâtisse ?
—
Pourquoi pas, mais il faudra que Muguette passe par la case grands-parents et
parents.
—
Sinon ?
—
Il n’y a pas de sinon, c’est comme ça chez les De La Rochefleurie.
Angelo
éclata de rire.
—
Ne fais pas cette tête, Muguette a de la ressource. Elle est capable de mettre
dans sa poche le Grand-Père. Mais parlons de toi. Tu te sens prête toi aussi à
quitter ton appartement et venir ici ?
—
C’est vrai qu’on est bien chez toi mais ça va un peu vite non ?
—
Tu ne trouves pas que nous avons assez attendu ? Nous avons passé l’âge de
demander la permission aux parents non ?
Jasmin
attendait Muguette depuis belle lurette. Elle lui avait donné rendez-vous dans
ce quartier pour aller visiter la maison qu’elle avait dénichée pour eux deux. Le
bouquet de fleurs allait finir par se faner à force d’attendre. Finalement, il
comprenait pourquoi selon une célèbre chanson, il valait mieux apporter des
bonbons. Un dernier coup d’œil à sa montre et en soupirant, il saisit son
portable. Il allait composer son numéro quand elle apparut :
—
Je suis désolée, un dernier client qui n’en finissait pas de partir… Bonjour
mon chéri !
Comme
d’habitude, Jasmin se laissa emporter par la bonne humeur de la jeune femme et
oublia qu’il n’y a pas deux minutes, il l’aurait envoyée à tous les diables.
—
Regarde, c’est cette maison ? Elle te plait ? J’ai les clés, je te fais visiter.
—
Au fait, Angelo m’a raconté l’histoire avec Anabelle. Tu as été géniale quand
même !
—
N’est-ce-pas ? Mes amis s’en sont donné à cœur joie avec la « Pouf ».
Quand elle a compris que c’était une blague, je te garantis qu’elle n’était pas
de bonne humeur. Mais je pense qu’elle a compris et qu’elle ne reviendra pas
ennuyer Thomas et Prune.
En
même temps qu’elle discutait, elle ouvrait la porte de la bâtisse. Une belle
odeur de renfermé leur chatouilla le nez mais Muguette ayant l’habitude de
faire visiter des maisons de toutes sortes, ouvrit aussitôt les fenêtres et le
soleil entra à flots dans les pièces de belles dimensions. Elle laissa trainer
le regard de Jasmin sur les murs défraichis et le suivit sans rien dire dans ses
découvertes.
Une
belle cuisine spacieuse complètement aménagée donnait sur le jardin. Muguette s’y
voyait déjà en train de préparer des petits plats pour son homme. Elle n’en
revenait pas d’arriver à se projeter dans la « vie à deux », elle qui
revendiquait haut et fort son indépendance.
—
Tu as vu, il y a quatre chambres, on pourra recevoir les amis. Et…Tu veux des
enfants Jasmin, demanda abruptement la jeune femme.
Surpris
par la question, car il ne reconnaissait pas sa Muguette, il ne répondit pas. Comment lui dire que cette maison lui
convenait parfaitement, même s’il fallait y faire des travaux. Qu’il se sentait
prêt à s’y investir. Certes, auparavant il devrait régler quelques problèmes
mais surtout, oui il avait envie d’avoir des enfants avec elle. La jeune femme
continuait à parler toute seule :
—
Parce que moi, je ne suis pas certaine d’en vouloir. Tu vois, j’ai déjà
trente-cinq ans et j’ai envie de profiter de la vie à deux…
Jasmin
soupira. C’était trop beau.
—
Mais, continuait la jeune femme perdue dans ses pensées, peut-être que
finalement, je me laisserais tenter. Préparer la layette pour un bébé, et
regarde cette chambre pourrait tout à fait convenir pour … Tu préférerais quoi
une fille ? Un garçon ?
Jasmin
la fit taire d’un baiser, la saisit dans ses bras et la fit tournoyer dans la
pièce qui faisait apparemment office de salon.
—
Fille ou garçon ça m’est égal, du moment qu’il ou elle te ressemble.
—
Vraiment ? Alors elle te plait la maison ?
—
Oui. Bien sûr il y a la décoration à revoir et…
—
Je vais faire une proposition aux propriétaires et faire chiffrer les travaux
et…
—
Attends Muguette, nous n’avons même pas parlé d’argent justement et…
—
Ne t’inquiète pas c’est dans les prix du marché, il n’y a pas d’entourloupe.
—
Ce n’est pas ça Muguette.
—
Alors quoi ?
—
J’aimerais te présenter à mes parents.
—
J’ai loupé quelque chose ? Que viennent faire ici tes parents ?