Le noyer du jardin crie « au voleur ! »
Le noisetier râle à qui mieux mieux, il se fait piller régulièrement.
- Il faut faire quelque chose, dit le noyer.
- C’est chaque année la même chose, se plaint le noisetier.
Le « voleur » c’est Panpan l’écureuil.
Les peupliers, les bouleaux et les pins sont ravis, eux, de le sentir
voler de branches en branches et de feuilles en feuilles. Ils retiennent leur
souffle quand il se rattrape de justesse et ils respirent d’aise quand la queue
en panache, il se pose pour grignoter une noix. Les coques tombent alors sur l’herbe
en dessous.
« Au voleur » gémit le noyer.
Panpan éclate de rire, dégringole le long du tronc et court se cacher
sur la réserve de bois. Les joues gonflées de son larcin, il regarde de tous
côtés et planque parmi les bûches sa réserve pour l’hiver. Puis il détale à toute
vitesse et escalade encore son arbre préféré qui ne peut que gémir à nouveau. S’il le pouvait le noyer hausserait les
épaules : ce chenapan l’exaspère en lui piquant ses fruits dont il est si
fier. Il aimerait bien au moins une fois, entendre des félicitations pour la
récolte qui pourrait rendre heureux l’homme qui le soigne et le regarde avec
amour pointer vers le ciel ses branches magnifiques. Au contraire, c’est Panpan
qui a droit à sa joie pour ses escalades, ses sauts et ses courses folles. L’homme
aime même trouver des coques vides un peu partout semées au gré des envies de
ce petit animal. A n’y rien comprendre.
Son compère le noisetier, résigné depuis longtemps, se laisse faire. « Il
est tellement mignon cet écureuil roux ! ». Jamais il n’osera avouer
qu’il guette son arrivée tous les jours car l’accident est si vite arrivé. La
route n’est pas loin et Panpan ne se méfie que de l’homme à pieds, il n’y
connaît rien en bolide qui roule à fond sur les routes de campagne.