Une maman qui prend soin d'elle. Qui aime écrire, lire et faire de la musique.

dimanche 28 janvier 2018

Jasmin De la Rochefleurie

Jasmin fulminait. La pluie le mettait vraiment de mauvaise humeur. En plus cette fille !!! Elle lui avait mis la tête à l’envers. Pourtant elle avait un caractère de cochon. Elle râlait sur tout, elle se moquait de tout, elle ne voyait qu’elle… et lui aussi ne voyait qu’elle. Quel imbécile ! Il s’en voulait de ne pas avoir insisté pour l’amener à son boulot, il aurait au moins su où la retrouver. Heureusement qu’il avait eu la présence d’esprit de laisser sa carte sur la table. Encore fallait-il qu’elle l’ait vue, ça c’était moins sûr !
Il sortit du parking souterrain et se dirigea vers son bureau.

- Bonjour Monsieur !
Ses collègues le saluaient comme tous les matins. Il venait d’intégrer le Centre des Impôts dont il en était le chef. Quand il avait offert un pot de bienvenue et qu’il s’était présenté « Jasmin de la Rochefleurie » il avait bien vu les sourires sur les visages de tous ses collaborateurs. « Merci les parents ». Il leur devait ce prénom suite à un pari ridicule un soir de réussite d’examen bien arrosé. En effet, il avait écopé lui et sa sœur de prénoms de fleurs. Accolé à leur nom de famille, ça frisait le mauvais goût. Jasmin et Pétunia. Même ses grands-parents n’avaient pas apprécié mais son père n’avait pas cédé. Il était pourtant avocat, il aurait pu plaider sa cause auprès de ses amis mais il les respectait trop, un pari reste un pari. Quant à sa mère artiste peintre, elle adorait ses enfants et trouvait que ça leur allait bien. Sa sœur Pétunia, 16 ans, était encore au lycée et grâce à ce prénom justement pas ordinaire, elle était appréciée de ses amis. Ils la trouvaient pétillante et fraîche comme la fleur du même nom. Ajouté à ça qu’elle avait de jolis yeux violets, oui, un vrai pétunia.
Mais lui Jasmin, il n’avait rien d’une fleur : 1m90, brun, musclé grâce à la natation qu’il pratiquait depuis qu’il avait 10 ans, doté d’une barbe qui donnait l’impression qu’il n’était pas rasé. Son père d’ailleurs lui en avait fait la remarque « tu fais négligé mon fils, dans ton travail tu te dois d’être impeccable ». Quand il avait répondu qu’il était rasé et que c’était sa tondeuse qui lui faisait « exprès » cette barbe naissante, son père avait haussé les épaules en ronchonnant dans la sienne, (celle-ci bien fournie et taillée au cordeau) « que ce n’était pas la peine d’acheter une tondeuse pour faire une barbe pas rasée ». Bref, il faisait plus penser à un chêne robuste sur qui on pouvait compter qu’à une fleur fragile qui perdait ses pétales au moindre coup de vent. De plus travailler aux Impôts, ça ne faisait vraiment pas rêver et surtout pas aux fleurs. 

Il alla se servir un café à la machine avant d’intégrer son bureau et croisa quelques collègues qui en ce lundi matin avait l’air endormi ou renfrogné. Sauf une contrôleuse qui elle, avait toujours le sourire quoiqu’il arrive. Il l’avait rencontrée plusieurs fois pour des dossiers épineux. Elle lui serra la main en lui demandant s’il avait passé un bon week-end et l’écouta répondre, ce qui n’était pas le cas de tout le monde. En général, on vous demandait toujours « ça va ? » et on n’attendait pas la réponse. Il s’était d’ailleurs dit qu’une fois, il répondrait « non ça ne va pas » juste pour voir la réaction. Il se rappelait son prénom, « Félicie » parce que lors d’une réunion ou il demandait qui devait participer à une formation, elle avait clamé « Félicie aussi » et tout le monde avait ri.

Enfin il réussit à entrer dans son bureau après avoir salué son adjoint et il posa son café.  Avant d’enlever son manteau, il fouilla ses poches et trouva une carte de visite. Il jura alors dans sa barbe mal rasée :
- Ce coup-ci c’est fichu, je ne retrouverai jamais cette fille. Il ne me restait qu’une carte de cet imprimeur débile qui avait oublié de noter mes coordonnées et il a fallu que ce soit justement celle-là que je lui donne.

Au même moment, Félicie face à son ordinateur saisissait son portable. Muguette sa meilleure amie, l’appelait.
 - Tu ne sais pas quoi ? J’ai rencontré un mec…


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