Une maman qui prend soin d'elle. Qui aime écrire, lire et faire de la musique.

mercredi 31 janvier 2018

Les deux amies


Amies depuis la maternelle, Félicie attendait Muguette à leur cafétéria habituelle. Elles y prenaient leur déjeuner ensemble quand leur emploi du temps respectif leur permettait.
Elle entendit Muguette arriver avant de l’apercevoir. Celle-ci pestait en regardant le menu :
- Encore des frites ! Ils n’ont pas entendu parler de la consommation de 5 fruits et 5 légumes par jour ici ?
Elle la vit bousculer les chaises sur son passage en maugréant, puis s’affaler enfin en soufflant devant elle.
- Tu vas bien ? Oui ? Comme d’habitude ! sourit Félicie.
Muguette contempla son amie et lui rendit son sourire. Elle seule avait le don de l’apaiser. Elle lui pardonnait tout, acceptait sans rechigner de l’accompagner au cinéma voir des films qu’elle n’aimait pas (évidemment les critiques fusaient ensuite mais Félicie n’y faisait même plus attention, elles passaient une bonne soirée c’était l’essentiel).
Les deux amies ne se ressemblaient pas autant physiquement que de caractère, mais c’est bien connu les contraires s’attirent. Félicie, petite jeune femme brune, coupe au carré, pas complexée pour deux sous par sa taille et ses rondeurs mises en valeur bien acceptées et Muguette, grande, brune aussi mais à la crinière indomptée et indomptable comme sa propriétaire d’ailleurs.

- Alors, raconte ! commença Félicie.
- Attends j’ai faim ! Tu as commandé ?
- Je te rappelle que c’est une cafétéria, qu’il faut prendre un plateau et…
- Oui, oui. Bon, on y va. On laisse les manteaux, personne ne nous piquera la place.
Félicie éclata de rire.
- Qui la voudra notre place ? Dans le coin, bien cachée par les plantes et à côté des toilettes.
- Oh ça va ! Je n’aime pas traverser toute la cafète, tout le monde me regarde.
Elles saisirent un plateau et suivirent la queue qui s’étirait devant elles.
- Tu as vu le monde ?
- Comme d’habitude Mug !
- Ne m’appelle pas Mug. Je ne suis pas une tasse de thé.
- C’est vrai pour celui qui ne te connait pas, mais tu sais bien que tu es ma Mug préférée. Elle la bouscula en lui disant ces mots et son rire fusa faisant se retourner les personnes devant elles.
- Vous voulez nos photos ? aboya Muguette.
Elles choisirent chacune une entrée de crudités, poisson-haricots verts pour l’une, poulet-frites pour l’autre et une mousse au chocolat pour Félicie qui ne savait pas terminer son repas sans dessert. Muguette se laissa aussi tenter tout en le regrettant dès qu’elles retournèrent à leur place.
- Pourquoi tu l’as prise alors ?
- Tu m’as fait envie !
- Alors savoure-la. Bon, alors raconte, tu as rencontré un mec ?
Muguette avala une bouchée de carottes râpées et répondit :
- Tu ne devineras jamais !
- C’est certain si tu ne me dis rien.
- Il pleuvait, le métro était en rade comme d’habitude. J’étais furax…
- Comme d’habitude aussi, l’interrompit Félicie.
- C’est moi qui raconte et si tu me coupes toujours, tu ne sauras rien.
- Compris je me tais, raconte.
- Donc, il pleuvait. Pas de métro, ma cafetière en panne je n’avais pas pris de petit déjeuner… tu ne trouves pas que les toilettes puent aujourd’hui ? Tu ne veux pas qu’on change de place ?
Félicie soupira. Comme à chaque fois, elles essaieraient de changer de place mais comme il y aurait trop de monde et qu’aucune place ne serait libre ou ne conviendrait pas à Muguette, elles reviendraient au même endroit et son amie pesterait.
- Non, on reste là. De toute façon, on ne va pas y rester des heures et en plus tu vas sortir ton « pschitt » de ton sac et…
Aussitôt dit aussitôt fait, Muguette se leva et vaporisa autour d’elles ses huiles essentielles. Elle alla même jusqu’à la porte des toilettes. Elle se fit apostropher pas une mamie qui se disait allergique aux huiles, ce à quoi la jeune femme répondit qu’elle, elle était allergique aux vieilles dames râleuses.
Félicie blasée déjeunait tranquillement. Mais l’heure tournait.

- Muguette, tu viens t’asseoir et tu me racontes. Dans un quart d’heure, je retourne au bureau.
- J’en étais où ?
- Tu n’avais pas pris de petit…
- Ah oui, donc j’avais faim. Je suis entrée dans le bar devant le métro. Il n’y avait pas de place. Un homme m’a proposé de m’installer à sa table…
- Et …
Muguette soupira en dégustant sa mousse au chocolat.
- Je n’ai pas dût être sympa.
Félicie éclata de rire.
- C’est un euphémisme, tu as dû être horrible. Lui dire qu’il te draguait, que tu pouvais te débrouiller toute seule…
- Oui. Un silence s’installa.
Félicie regarda son amie qui murmura :
- Il m’a proposé sa voiture…
- Hou la !
- J’ai refusé comme une imbécile et il est parti.
- Et ?
- Il avait laissé sa carte sur la table. Tu te rends compte, il me draguait vraiment !
- Tu as ses coordonnées alors ?
- Ben non, regarde, il n’y a même pas son téléphone. Par contre, tu as vu son prénom ?
Félicie jeta un œil sur le bristol et … avala de travers sa dernière cuillère de mousse au chocolat.


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