— Tu
crois qu’ils vont penser aux œufs de Pâques ?
Héloïse
tourne en rond dans le jardin. Elle est face aux clapiers de Joe et discute
avec les lapins. Si Stefano l’entendait, il se moquerait encore d’elle en lui
répétant qu’elle n’est plus un bébé. Sauf qu’Héloïse n’est pas une enfant comme
les autres. Très sensible, elle sent les choses et aujourd’hui plantée devant
la lapine qui vient d’avoir des petits, elle lui parle. Elle l’a baptisée
Hermine.
— Je
sais bien que l’histoire des cloches qui déversent les œufs dans les jardins,
ce n’est pas possible, mais moi je voudrais bien y croire quand même. Tu penses
que tu pourrais m’aider ?
Hermine
de couleur marron la regarde de ses grands yeux noirs tout en mâchonnant son
brin de luzerne.
— Moi
j’aimerais bien que les animaux parlent comme dans les livres. Tu n’en aurais
pas envie toi ?
— Avec
qui tu bavardes ?
C’est
Joe, toujours affublé de son chapeau qui s’approche d’elle.
— Ne
l’embête pas ! Elle doit s’occuper de ses lapereaux, n’y touche pas surtout,
sinon elle pourrait les abandonner si elle sent ton odeur.
Héloïse
soupire.
— D’accord,
je m’en vais.
Joe
qui descendait de son tracteur l’attrapa gentiment au passage quand elle passa devant
lui.
— Attends,
je ne t’ai pas demandé de partir, seulement de ne pas la toucher. Je t’ai déjà
expliqué. Elle sent ton odeur et c’est étranger pour elle.
— Je
sais, je ne l’ai pas caressée.
— Tu
es toute triste, qu’est-ce qu’il t’arrive encore ?
— Rien !
Et
elle le planta là. Joe soupira. Il avait bien compris que quelque chose la
tracassait, mais il avait du travail, il haussa les épaules et remonta sur son
engin.
— Et
si j’allais voir les poules ? Peut-être qu’elles pourraient m’aider !
Stefano
l’aperçut alors qu’il faisait du vélo dans le parc. Il vint à sa rencontre.
— Tu
joues avec moi ? On fait la course ?
— Non,
j’ai autre chose à penser.
Il
éclata de rire.
— Ah
oui ? Et à quoi ?
— Arrête
de te moquer de moi, tu verras bien.
Il
haussa les épaules et reprit son vélo. Les filles c’était d’un compliqué !
Héloïse
entra dans le poulailler déclenchant des cot cot indigné de la basse-cour.
— Ne
faites pas tant de bruit, j’ai besoin de vous.
Les
volailles se turent aussitôt, comprenant qu’elle ne leur voulait pas de mal.
Elles continuèrent leur balade nonchalante dans l’herbe.
— Vous
pourriez vous arrêter de picorer quand même ! J’ai quelque chose à vous
demander ! Pourriez-vous me faire de beaux œufs de Pâques colorés ? Et les
disperser dans le jardin ?
Les
bestioles ne relevèrent même pas la tête.
— D’accord,
vous ne m’écoutez pas ! S’il vous plait votre attention !
Héloïse
claqua les mains, ce qui pour effet de stopper net le picorage. Le coq majestueux
se demanda alors ce qu’il se passait et vint à la rencontre de la petite fille.
Il tendit le cou et s’approcha plus près.
— Elles
ne te répondront pas, elles n’ont pas de langue.
Héloïse
sursauta et se reprit aussitôt.
— Parce
que toi tu en as une peut-être ?
— Moi
je suis le maître ici, ce n’est pas pareil.
— C’est
ça, fais le malin !
— Dis
donc, tu pourrais me demander pourquoi je te parle au lieu de me faire un cours
d’anatomie.
— Écoute
Victor, je sais que tu es le chef de la basse-cour, mais…
— Comment
m’as-tu appelé ? Victor ?
Il
gonfla le jabot, sa crête rougit de plus belle et il se tourna vers ses poules.
— Vous
avez entendu ? Je suis Victor.
—
Il n'y a pas de quoi pavoiser, rétorqua une poulette plus délurée que les
autres, au cou dégarni, une houppette ébouriffée sur la tête.
— Tu
vois qu’elles parlent aussi !
Héloïse
tapa des mains.
— Je
vais vous demander de faire une surprise. Mais c’est un secret. Promis, vous tiendrez
votre langue ?
Elles
répondirent toutes ensemble.
— On
n’en a pas de langue, on ne peut pas la tenir !
Elles
caquetèrent de plus belle comme si elles avaient pris un fou rire. Gagnée par
leur bonne humeur, Héloïse se mit à sauter partout dans le poulailler.
— Venez
à côté de moi, je vais vous dire à quoi je pense.
À
suivre…
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