Muguette est encore sous le choc de sa rencontre avec Prune. Non pas qu’elle
ne soit pas remise de sa chute, mais parce qu’elle avait retenu que sa voisine connaissait
Jasmin. Comme toujours dans ces cas-là, elle saisit son téléphone et appela
Félicie.
- Devine quoi ? Muguette ne se présenta même pas. Si elle s’était
trompée de numéro, c’était pareil. Elle aboya dans le téléphone :
- J’ai rencontré quelqu’un qui va à la piscine avec Jasmin. C’est super
non ?
Félicie qui s’apprêtait elle aussi à affronter la neige en laissa
tomber ses clés de voiture et s’écroula dans le premier fauteuil venu. « Ouf,
pensa-t-elle, ce n’est pas donc le Jasmin du Bureau, tant mieux, parce que j’aurais
dégusté ! »
- Ah, il habite dans ton coin, génial !
- Je n’en sais rien ça s’il habite par ici. Si je vais à la piscine tu
m’accompagnes ? C’est couvert et chauffé, précisa-t-elle, se rappelant la
réflexion de Prune.
- Mug ? Tu n’as rien oublié ?
- Ne fais pas ta rabat-joie, quoi encore ?
- Tu ne sais pas nager.
- Bah, ça s’apprend vite non ?
- Mug ? Tu as peur de l’eau, voilà pourquoi tu ne sais pas nager.
Muguette à son tour s’affala dans son fauteuil. Elle n’avait pas pensé
à ça.
- Allo, tu es toujours là ?
- Comment je vais faire alors ?
- Mais es-tu certaine au moins que c’est bien le Jasmin que tu as
rencontré ?
- Il ne doit pas y en avoir des mille de mecs qui s’appellent comme ça,
tu ne crois pas ? ronchonna Muguette, il faut être complètement zinzin
pour appeler son fils « Jasmin ». Il ne manquerait plus qu’il ait une
particule.
Félicie pensa à son directeur des impôts. Il avait bien une particule
lui, et il s’appelait Jasmin.
- Tu veux que je vienne ? J’allais prendre la voiture de toute
façon.
- Avec la neige ce n’est pas prudent. Je ne voudrais pas qu’il t’arrive
un accident, de toute façon tu ne peux rien faire, je ne vais pas apprendre à
nager dans la minute… Quelle idiote d’avoir cette phobie de l’eau.
- Tu sais, on peut aller à la piscine sans se baigner et s’installer
dans les gradins.
Muguette se leva d’un bond et tapa dans ses mains, son téléphone lui
échappa alors des mains.
- Tu es toujours là ?
- Oui, oui. Muguette avait récupéré son portable et hurlait dans l’appareil.
Viens, alors. Mais tu ne dis pas que je ne sais pas nager hein ?
- Elle habite où ta voisine ? Tu veux que je te récupère là-bas ?
- Non, je vais y repartir à pieds pour lui dire que je vais les rejoindre
plus tard et elle raccrocha.
Félicie soupira. Elle ferait ses courses plus tard. Elle avait l’habitude
avec Muguette. Elle sifflait et elle, elle rappliquait. C’était vrai aussi dans
l’autre sens.
Muguette marchait doucement. Pas question de s’étaler encore. Elle n’habitait
vraiment pas loin Prune. Elle s’approcha et n’aperçut pas de voitures devant
chez elle. Décidée, elle sonna à la porte.
Il n’y avait personne. Déçue, elle repartit dans l’autre sens.
- Tu en as mis du tu temps ! Félicie venait de se garer devant
chez Muguette qui faisait des aller- retour depuis au moins vingt minutes.
- Je ne sais pas si tu te rends compte qu’il y a de la neige, je n’avais
pas envie de…
- Bon, allez, on y va. Je le sais qu’il y a de la neige !
Félicie ne se formalisa pas de l’accueil de son amie et prit la
direction de la piscine.
- Regarde, elle est là. Muguette ouvrit la portière avant que la
voiture ne soit arrêtée.
- Tu es folle !
Muguette avait sauté de la voiture en marche et faisait de grands
signes en appelant Prune qui alertée se retourna.
- Finalement vous êtes venue ? Vous n’avez plus mal à votre cheville
et vous n’avez plus peur d’avoir froid ?
- Oui j’ai changé d’avis ! Mais je ne vais pas me baigner, c’est
mon amie qui a insisté…
Félicie qui arrivait tendit la main à Prune et se présenta.
- Félicie ? Quelle surprise ?
La jeune femme se retourna.
- Monsieur…
- Pas de Monsieur, appelez-moi Jasmin !
Muguette ouvrit de grands yeux et fronça les sourcils. Félicie sentit l’orage
arriver.
- Tu le connais ? Quelle amie tu fais. Vraiment, tu me déçois !
Jasmin n’en croyait pas ses yeux. Il avait devant lui la jeune femme
qui ne quittait pas ses pensées depuis quelques jours. Elle avait l’air très
énervée. Elle se tournait d’ailleurs vers lui et l’apostrophait vertement :
- Depuis quand on laisse sa carte de visite sans ses coordonnées ?
Vous vivez dans quel monde ? Comment voulez-vous que je vous rappelle moi ?
- Ah vous vouliez me revoir ? demanda-t-il goguenard, je suis
heureux de l’apprendre.
Muguette rougit violemment. Elle ignora la question.
- Toi Félicie, que dis-tu pour ta défense ?
- On y va à la piscine ? demanda timidement Prune que la situation
dépassait complètement.
- Non d’abord explique-toi, ordonna Muguette.
- Mais il n’y a rien à expliquer répondit celle-ci, tu l’as dit
toi-même, tu ne connaissais pas le nom de Jasmin, je ne pouvais pas savoir qu’il
s’agissait de lui.
- En fait, renchérit Jasmin, je travaille avec votre amie. Faisons les
présentations, Jasmin de la Rochefleurie, et je suis le chef du centre des
impôts et je vois Félicie tous les jours.
- C’est ça, et je suis la reine d’Angleterre. Avec un nom pareil, aux
impôts, vous me décevez, trouvez mieux. Muguette éclata de rire et répéta :
- Aux impôts ? Non, mais je rêve … Devant le silence qui s’installa,
elle interrogea son amie du regard qui hocha la tête.
- Et voici ma sœur Pétunia.
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