Fred et Pétunia se chamaillaient.
_ Tu m’avais promis … râlait la jeune fille.
_ D’accord, d’accord, regarde elle n’a que trois
vues, je la supprime, il n’y a pas longtemps qu’elle est publiée et ça
n’intéresse personne.
Aussitôt dit aussitôt fait, la vidéo disparut.
_ Il n’y avait pas de partage ? demanda Pétunia
_ Je n’ai pas fait attention, mais avec trois vues,
je ne le pense pas.
Ce même jour Muguette appela Félicie.
_ Je te prie de m’excuser. Je sais que j’ai été un
peu…
_ Oui tu es allée trop loin.
_ Tu m’en veux ?
Félicie ne répondit pas.
_ Allo, tu es toujours là ?
_ Mug, tu m’as fait beaucoup de peine. Comment as-tu
pu croire que je te mentais ? As-tu bien réfléchi ? Comment je
pouvais savoir ?
_ Jasmin ce n’est pas un prénom connu.
_ D’accord, mais il ne doit pas y avoir qu’un homme
qui s’appelle Jasmin.
_ Avoue que c’est une drôle de coïncidence…
- J’avoue. J’aurais
préféré tu sais, qu’il ne s’agisse pas de mon directeur.
_ Pardonnée ?
Félicie soupira si fort que Muguette éloigna son portable
de son oreille.
_ Vraiment Félicie, pardon, mais tu me connais quand
même…
_ Cela n’excuse pas tout Muguette.
Elles se turent toutes les deux pendant quelques
minutes et Muguette reprit :
_ Tu sais, il est venu ici.
_ Je m’en doute, il m’avait demandé ton adresse.
_ Nous nous voyons demain dans le même bar. Il veut
que nous recommencions tout à zéro.
Félicie ne répondit pas.
_ Au fait, il ne savait pas que je m’appelais
Muguette. J’ai eu l’air ridicule quand il a compris que je voulais le revoir
parce qu’il s’appelait Jasmin.
Devant le silence de son amie, elle
demanda d’une toute petite voix, ce qui n’était pas dans ses
habitudes :
_ Tu veux venir prendre un chocolat chaud, on
s’installera dans le canapé et …
La sonnette de l’entrée l’interrompit. Portable à
l’oreille et pestant contre l’importun, elle ouvrit la porte.
_ Alors il est prêt ce chocolat ?
Les deux amies se jetèrent dans les bras l’une de l’autre.
Le lendemain matin Jasmin se leva tôt un peu anxieux.
Il voulait être le premier installé pour voir arriver la jeune femme.
Muguette après avoir passé une excellente soirée avec
Félicie à manger des guimauves trempées dans du chocolat, était aussi matinale
pour avoir le temps de se préparer. Juste un café, avec une cafetière en bon
état de marche cette fois-ci. Son portable sonna quand elle partait
s’habiller :
_ C’est Lally ! Je ne savais pas que tu te
donnais en spectacle sur la toile… C’est d’un ridicule !
Muguette ouvrit de grands yeux et ne comprit rien à
ce que marmonnait son amie. « La toile » Quezaco ? Muguette
n’était pas branchée réseaux sociaux, elle pratiquait juste son portable.
_ Bonjour Lally. De quoi tu me parles ?
_ Ne me dis pas que tu n’es pas au
courant ? La vidéo sur
Internet ?
_ Je n’ai pas de lecteur DVD.
_ Tu le fais exprès ? Je ne te parle pas de
lecteur DVD, je parle de toi sur la toile et…
_ Tu parles de peinture là ?
_ Arrête Muguette, ne te fiche pas de moi ! Une
vidéo, tu sais ce que c’est ?
Vexée, celle-ci se rebiffa :
- Hey l’amie, je ne suis pas née de la dernière pluie
quand même mais je ne comprends rien à ce que tu me racontes.
_ Allô ? Allô ?
Muguette regarda son portable éteint.
_ Plus de batterie quelle poisse ! mon chargeur,
où est-il ? Elle souleva les coussins, regarda dans la cuisine, sur le meuble
de l’entrée, elle courut dans sa chambre. Il restait introuvable. En soupirant,
elle décida de s’en passer et fila sous la douche. Elle avait oublié de quoi
avait parlé Lally.
Jasmin enfilait son manteau quand son téléphone
vibra. Il ne reconnut pas le numéro affiché mais par courtoisie, il décrocha.
_ Bonjour Monsieur De la Rochefleurie. Je suis
heureuse de vous trouver. C’est Cunégonde Deporte à l’appareil, votre adjointe.
Surpris, Jasmin ne comprit pas pourquoi sa collègue l’appelait
un dimanche. Elle avait effectivement son numéro pour pouvoir le joindre en cas
d’urgence quand il était en rendez-vous professionnel, mais il n’avait jamais
été question de s’immiscer dans sa vie privée.
_ Je comprends que vous soyez surpris de mon appel,
mais j’aimerais parler avec vous d’un petit problème.
_ Mais enfin Madame Deporte, cela ne pouvait pas
attendre demain ?
_ Je vous en prie appelez-moi Cunégonde et non c’est
assez urgent. Pourriez-vous me rejoindre au bar devant la station de métro dans
une demi-heure ?
Jasmin n’en crut pas ses oreilles, un rendez-vous
avec sa collègue un dimanche matin. Il refusa.
_ Je ne pense pas que vous en ayez la possibilité,
Jasmin. Je vous envoie une vidéo que vous allez avoir plaisir à regarder, je
vous attends dans une demi-heure. Elle raccrocha.
Une notification s’afficha alors sur son portable, il
ouvrit le fichier. Il appela aussitôt Muguette.
Celle-ci était prête, elle n’avait plus que dix
minutes devant elle pour ne pas être en retard. Elle monta dans sa voiture, mit
la radio et se mit à fredonner. D’humeur joyeuse pour une fois, tout lui
semblait plus beau, alors que c’était le même parcours que tous les matins. Elle
gara sa voiture sans encombre et se dirigea vers le bar le cœur battant. Elle entra
dans la salle et chercha des yeux Jasmin qu’elle découvrit attablé avec une femme qui
lui caressait la main. Son sang ne fit qu’un tour, sans réfléchir davantage,
elle saisit un plateau qui attendait d’être servi rempli de café et de
viennoiseries et se dirigea vers leur table.
_ Bon appétit Monsieur De la Rochefleurie ! Elle
lui balança le tout dans la figure et repartit en sens inverse la tête haute.
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